mercredi 19 juin 2013

La marche, une philosophie de vie ?

Je rentre d'une randonnée en montagne, fourbu mais heureux; comme chaque fois un sentiment de paix m'habite. 

Si je n'ai pas envie de repartir tout de suite c'est que je sais qu'il me faut un peu de repos mais dans deux ou trois jours ça va me reprendre et je repartirai tout aussi heureux.
Ne crois pas que ce soit facile; en montagne il faut de la volonté; c'est parfois très raide et tu es aux limites de tes forces et plus l'âge avance plus elles diminuent; le poids du sac à dos se fait sentir chargé qu'il est de l'indispensable pour survivre en cas de problème; vêtements de rechange, nourriture etc...et pour moi en plus l'appareil photo.


Lorsque je marche sur les sentiers, mon regard se porte bien sûr ou je pose les pieds mais aussi sur ce qui m'entoure, tout ce qui m'entoure, y compris les détails; sans en avoir l'air, je suis concentré; l'oeil du photographe amateur sans doute, veille. Comme si tous mes sens étaient en éveil.

Les pierres, la roche,la végétation, les fleurs, les cascades, la neige, le ciel que je préfère lorsque les nuages courent donnant ainsi plus de relief, le vent au passage des cols, et bien sûr les animaux sauvages chamois, bouquetins, marmottes,renards ,oiseaux planeurs....la liste et longue et dans les alpages , les vaches, les brebis,les chèvres.


Quand à mes pensées, en apparence rien ne semble pouvoir les arrêter; elles vont et viennent à leur gré. Mais j'ai le sentiment d'être déconnecté de tout, hors du temps et de n'être plus personne. Je ne cherche pas à me "retrouver" puisque je suis avec moi.
(suis-je clair là ? pas sûr.)

Je pense à ceux que j'aime, je me demande ce qu'ils font pendant que je transpire et puis je pense à moi parfois; alors ma vie défile par flashes, des images enfouies depuis parfois longtemps resurgissent sans prévenir; les événements dont je peux être fier et les autres; je vois alors clairement les moments ou à certains carrefours de ma vie je n'ai pas pris la bonne route. Je me dis que certes elle aurait pu être alors différente mais je n'ai pas de regrets.


En montagne on ne compte pas en kilomètres mais en temps et éventuellement en dénivelée.
Les meilleurs moments sont ceux des arrêts ou on prend le temps de boire , de contempler encore et toujours.
Je ne parle pas ou peu quand je marche; d'abord j'aurais du mal , j'ai besoin de l'air de mes poumons uniquement pour respirer mais je me rattrape pendant la pause "casse croûte" moment essentiel de partage. Le plus souvent nous sommes deux avec ma compagne mais nous pouvons être quatre; pas plus;après c'est autre chose et ça me convient moins.

J'ai toujours en marchant une pensée pour nos ancêtres agriculteurs des pentes comme j'aime les appeler,forestiers, montagnards, colporteurs ou contrebandiers qui ont façonnés par milliers au fil des siècles les sentiers de ces montagnes.
 le sentier que j'emprunte a été foulé par ces hommes et ces femmes qui n'avaient pas d'autres moyens pour se rendre d'un endroit à l'autre ; pas de cartes pas de panneaux de signalisation comme aujourd'hui.


Quand je marche, je pense aussi à tous ceux qui ont par cette simple action trouvé , expérimenté, reçu leur inspiration de ces moments ou souvent seuls , ils marchaient; tu veux quelques nom de marcheurs ? Dans le désordre:
Jean-Jacques Rousseau, Henry D. Thoreau, F. Nietzsche,Jacques Lanzmann,Edith de la Heronnière,Marcel Proust, Alexandra David-Néel,Gustave Flaubert, Arthur Rimbaud, Nerval,Sylvain Tesson, Frédéric Gros, Jean-Christophe Ruffin......la liste serait trop longue; j'arrête.
Cette Pensée de Nietzsche qui résume  bien l'état d'esprit du philosophe:
"Demeurer le moins possible assis; ne prêter foi à aucune pensée qui n'ait été composée au grand air, dans le libre mouvement du corps- à aucune idée ou les muscles n'aient été aussi de la fête. Tout préjugé vient des entrailles. Etre "cul-de-plomb", je le répète, c'est le vrai péché contre l'esprit."


Attention, marcher n'est pas un sport au sens ou il n'y a pas de compétition et que c'est quand tu veux et ou tu veux. La seule performance autorisée est celle de la beauté de la nature dans toute sa splendeur et son authenticité.
Quand nous avons la chance d'avoir deux jambes avec un pied au bout de chacune, il faut juste un peu de volonté pour démarrer et ensuite c'est une invitation au voyage.


Et si la marche dans ce qu'elle peut avoir de répétitif, juste un pied devant l'autre, nous dirigeait à pas lents vers une forme de bonheur ?

Assis au pied d'un torrent qui descend avec force en se faufilant entre les pierres, chargé de l'eau de fonte , je fais chaque fois la comparaison avec la vie de l'homme; la fougue de la jeunesse, les moments de calme , les épreuves qui reviennent parfois plusieurs fois à différents stades de la vie pour en bas s'assagir enfin et se perdre dans la mer, ou se retrouver. 




Qui sait ?
Je viens d'entendre sur France Inter alors que je m'apprête à poster ce billet sur le blog que nous serions 8 millions à marcher régulièrement( c'est pas mal) . Me voilà rassuré je ne suis pas si original que cela.
-titou-


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire